Frames

in situ

Dans son célèbre essai Parergon, le philosophe français Jacques Derrida pose la question suivante au/à la lecteur.ice : “Supposons qu’un cambrioleur ne vole que les cadres des oeuvres d’art dans votre maison, et non les oeuvres elles-mêmes. Qu’est-ce qui changerait dans vos rapports avec l’art?”

Dans sa nouvelle production Frames (2025), Alexander Vantournhout inverse cette expérience de pensée : et si le cambrioleur emportait le tableau mais pas le cadre ? Que signifie et que fait encore ce cadre? Quelle est l’importance et le potentiel d’un cadre visuel? Est-ce un ‘parergon’ – un élément secondaire et accessoire – ou bien un élément structurel de l’oeuvre d’art?

Frames explore l’élément théâtral souvent considéré comme acquis, l’élément qui rend le théâtre possible en premier lieu: le cadre qui façonne le regard du/de la spectateur. La performance s’appuie sur des recherches théâtrales explorées dans des oeuvres précédentes comme Foreshadow (2023), qui a rapproché le mur du fond du théâtre du public, et Through the Grapevine (2020), qui a défié le théâtre à l’italienne avec un point de vue en trapèze ou un sol en trompe l’oeil.

Comme SCREWS (2019), cette nouvelle production invite le public, hors des murs du théâtre, à un voyage à travers 3 ou 4 pavillions ou tableaux, dans ce cas d’un ‘cadre’ à l’autre. Ces fenêtres au travers desquelles le regard est dirigé sont stratégiquement positionnés dans l’espace public, d’un dispositif du public circulaire à un dispositif frontal et bifrontal.

Le travail d’Alexander Vantournhout a toujours été profondément interdisciplinaire, oscillant entre danse, cirque et théâtre. Frames est une extension et une approche explicite du monde des arts visuels, auxquels les cadres de vision sont empruntés. De plus, la scénographie des cadres + l’environnement joue un rôle crucial et rend le travail presque architectural par nature.